Le Péché de Chávez : avoir rompu avec les politiques d’austérité impulsées par le FMI
Par
Alexis Corbière
Front
de Gauche
Je
suis allé au Venezuela en septembre 2012, notamment pour participer
à des meetings et des réunions publiques organisés par le Parti
socialiste unifié vénézuélien (PSUV) à Caracas et Maracaibo.
J’en garde un souvenir très fort. C’était l’occasion
d’expliquer pourquoi moi, en tant que militant et élu français,
j’estimais qu’il était important qu’Hugo Chávez soit réélu
plutôt que le candidat de droite.
À
partir de sa première élection en 1999, Chávez a rompu avec les
politiques d’austérité impulsées par le FMI, reprises hélas par
l’Union Européenne, qui ont toujours menée à la catastrophe.
Hugo
Chávez a fait de la politique sociale son axe majeur. Il a donné la
priorité aux pauvres qui étaient si nombreux avant son élection.
Les résultats sont là : l’analphabétisme et la pauvreté ont
fortement reculé parce qu’il y a eu des investissements publics
dans l’éducation et la santé. Chávez disait souvent que, sous
ses mandats, le Venezuela était devenu "une gigantesque salle
de classe". C’est pourquoi je soutiens la révolution
bolivarienne qu’il a lancée : elle a réduit la pauvreté par
quatre en six ans, de 54% en 1995 à moins de 25% aujourd’hui.
Aujourd’hui, plus de 50% de la population poursuit des études.
C’est un beau bilan, non ? Qui dit mieux ?
Il
est donc temps de rétablir des vérités face aux torrents de
calomnies qui sont déversés contre lui depuis sa mort et même
avant. Contrairement à ce qui est dit trop souvent, sous son
impulsion, le Venezuela a connu un processus démocratique. Une
nouvelle constitution a été mise en œuvre grâce à une Assemblée
constituante. Le peuple s’est mêlé inlassablement de ces
questions. En 2012, c’était le 16e scrutin au Venezuela en 13 ans.
Les inscriptions sur les listes électorales sont passées de 11 à
16 millions entre 2003 et 2006. La participation électorale a
toujours augmenté, scrutin après scrutin.
Les
interventions dans les médias d’Hugo Chávez étaient denses
politiquement et visaient à expliquer en détail sa politique et
comment la mettre en oeuvre. Il le faisait avec exigence mais aussi
avec humour pour être entendu par les milieux les plus populaires.
Il voulait ainsi convaincre ses concitoyens de s’intéresser à la
politique.
Il
a en grande partie réussi. Beaucoup de jeunes et de femmes en
particulier se sont impliqués dans la vie publique. C’était du
jamais vu dans ce pays. S’il parlait autant de Simon Bolivar et de
l’histoire de son pays, c’était pour rendre le pouvoir au peuple
et expliquer que cette démarche était dans la continuité du
fondateur historique du pays.
Il
voulait également que les richesses du pays (et notamment le
pétrole) soient mises au profit du peuple et pas seulement d’une
poignée d’oligarques comme cela avait pu être le cas
précédemment.
Mais,
fondamentalement, on ne comprend rien à Hugo Chávez si l’on
oublie que le 27 février 1989, des milliers de manifestants qui
s’opposaient alors aux politiques d’austérité en cours, voulues
par le FMI et mises en œuvre par un gouvernement qui était soutenu
par l’Internationale socialiste, furent rudement réprimés. On
estime qu’il y eu alors près de 3.000 victimes. C’est ce qu’on
a appelé le "caracazo".
Après
cette tragédie, toute la vieille scène politique a été rejetée
et détesté. C’est pour rompre avec cette violence et ces
politiques absurdes qu’un homme comme Hugo Chávez est apparu et
qu'il est devenu si populaire. Il voulait tout faire pour que cela
change et pas seulement par des paroles. C’était en quelque sorte
un des premiers "indignés" planétaires. Il était un
révolutionnaire. Mais, il restait vigilant à ce que le peuple
puisse toujours contrôler ses représentants. Aujourd’hui, un
processus de révocation permet ainsi de contester le pouvoir, de
révoquer les élus et de demander des élections si les
pétitionnaires sont assez nombreux.
Autre
mensonge absurde : l’opposition existe au Venezuela et elle est
très active. Elle n’a jamais été réduite au silence. Lorsque
j’y suis allé, j’ai pu le constater. Dans la rue, à la
télévision, elle s’exprime vigoureusement et peut faire passer
ses idées. Il y a plus de journaux, des chaines de télé
anti-Chávez que de pro-Chávez., contrairement à ce que l’on
pourrait croire.
Un
pays dont on peut s'inspirer
Il
va de soi néanmoins que le Venezuela ne peut être un modèle pour
la France car les deux pays sont très différents. Mais, il est
utile de s’en inspirer. Ce qu’il s’y passe démontre cependant
de façon vivante qu’il est possible de refuser les politiques
d’austérité. On peut donner la priorité à la question sociale,
le peuple peut récupérer sa souveraineté nationale sur les
richesses nationales, des assemblées constituantes sont possibles
pour bâtir des constitutions plus démocratiques qui permettent que
des milliers de personnes retournent aux urnes.
J’affirme
que la constitution bolivarienne instaure un régime bien plus
démocratique que ce qu'a connu le pays auparavant. Dans 30 jours, un
nouveau président sera élu pour remplacer Hugo Chávez et on
confirmera concrètement que ce qu’il a engagé continue et que
l'État ne s’effondre pas après sa mort. Je salue une nouvelle
fois le fait que Chávez a toujours défendu qu’il fallait faire
voter et revoter. Sans soutien populaire, aucune politique de gauche
n’est possible.
Ce
qu’il a construit n’est pas une expérience politique
avant-gardiste basée sur un coup de force, c’est une réalité
très profonde à rebours de ce qu’il se passe en Europe. Lorsque
je vois comment la construction de l’Union européenne se moque des
peuples, des protestations – avec l’exemple du mépris des
résultats du référendum en 2005 sur le traité européen, avec
l’abstention qui augmente lors des scrutins européen, je considère
que oui, ce qu'il s’est passée au Venezuela sous l’impulsion de
Chávez, est une boussole qui montre la bonne direction. .
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