USA : Le "Monsanto act" met les OGM au-dessus de la loi
C'est
un amendement discret glissé dans une loi budgétaire pour
l’agriculture aux Etats-Unis, mais il provoque scandale et
stupéfaction chez les défenseurs de l’environnement et les
ennemis des OGM : la justice américaine ne pourra plus s’opposer
aux mises en culture de plantes génétiquement modifiées, même si
elles n’ont pas reçu d’homologation et sont de ce fait
illégales.
Que
dit l’article 735 de ce texte de loi, affublé du surnom de
"Monsanto Protection Act" et désormais voté par le
Congrès et approuvé par le président Barack Obama ? Que "dans
le cas où une décision [d’autorisation de culture] est ou a été
invalidée ou annulée, le ministère de l’agriculture doit (...),
sur simple demande d’un cultivateur, d’un exploitant agricole ou
d’un producteur, accorder immédiatement une autorisation ou une
dérogation temporaire." Ce dans le but de "s’assurer que
les cultivateurs ou d’autres acteurs sont en mesure de déplacer,
planter, cultiver, introduire dans le commerce" les semences en
question et les cultures qui en sont issues.
Pour
Greenpeace Canada, "la signature de cette loi par le président
Obama ne permettra plus aux tribunaux américains d’empêcher la
vente et la plantation de plantes OGM même si elles n’ont pas été
approuvées par le processus pourtant déjà laxiste des
autorisations et quelles que soient les conséquences pour
l’environnement ou la santé".
Les
ONG soupçonnent le sénateur républicain du Missouri, Roy Blunt,
décrit par le magazine Mother Jones, le 4 avril, comme "l’homme
de Monsanto à Washington", d’être l’auteur de cet
amendement. D’autres élus ont tenté de s’opposer au texte,
comme le sénateur démocrate du Monatana Jon Tester. Selon lui, par
cette loi, le gouvernement contraint son propre ministère de
l’agriculture à "ignorer une décision d’un tribunal qui
interdise la plantation de cultures OGM parce qu’elles sont
illégales". Une autre sénatrice démocrate, Barbara Mikulski
(Maryland), a présenté des excuses publiques pour l’adoption de
cette loi.
LA
CRAINTE D’UN DANGEREUX PRÉCÉDENT
La
mesure a révolté les milieux démocrates et écologistes – une
pétition baptisée "Food Democracy Now" a déjà recueilli
250 000 signatures. Mais le très droitier Tea Party a lui aussi fait
part de sa colère face à une opération de lobbying qui fausse la
libre concurrence. Les entreprises devraient "respecter les
règles du libre-marché comme tout le monde, au lieu de recruter des
lobbyistes pour réécrire les règles à leur profit à Washington",
écrit ainsi le think tank conservateur Freedom Works.
Le
"Monsanto Protection Act" est censé n’être que
provisoire : la loi dans laquelle il s’inscrit expire en principe
au mois de septembre. Mais les défenseurs de l’environnement
craignent que la décision ne crée un dangereux précédent.
Cette
affaire intervient alors que Monsanto, dont les semences alimentent
93% du soja, 88% du coton et 86% du maïs aux Etats-Unis, a annoncé,
mercredi 3 avril, une hausse de 22% de ses bénéfices au deuxième
trimestre. Et au moment où les Etats-Unis font pression sur
l’Europe, dans le cadre de la négociation d’un accord de
libre-échange, pour que les Vingt-Sept simplifient leur
réglementation en matière d’importation de produits OGM, jugée
"inapplicable" et "lourde", lundi 1er avril par
le Bureau au commerce extérieur américain dans un rapport sur les
mesures sanitaires dans le monde.
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