Grèce : l'extrême droite au gouvernement


Il N'Y A PAS QU'AUBE DORÉE EN GRÈCE




PARTI NATIONALISTE, ANTISÉMITE ET XÉNOPHOBE, LE LAOS ENVAHIT LA GRÈCE

Décidemment la Grèce est bien le laboratoire de l'Europe et sert de test à ce qui pourrait se passer dans bien d'autres pays.que l'on dit démocratiques.

L’entrée au gouvernement de la formation d’extrême droite ne fait pas de remous dans le pays.



Jean-Marie Le Pen était l’invité d’honneur de son mariage et Carl Lang son témoin à l’église : Makis Voridis a beau avoir l’allure d’un avocat bon teint de la bourgeoisie grecque, ce quadragénaire au visage poupin n’a jamais caché son admiration pour le Front national et milite au sein de l’extrême droite depuis l’époque où il brisait les manifs de gauche à la fac de droit. Il est désormais ministre des Transports dans le nouveau gouvernement de coalition censé sauver la Grèce de la faillite. Pour la première fois depuis la chute de la junte des colonels en 1974, l’extrême droite participe au pouvoir. Un tabou est ainsi brisé sans susciter beaucoup d’émotion. «Tout le monde s’en fout ! Même une partie de l’extrême gauche estime que ce n’est pas une priorité de protester contre l’arrivée de ces fascistes xénophobes et antisémites au gouvernement»  déplore le journaliste Georges Mitralias.


Quatre membres du Laos (Rassemblement populaire orthodoxe, dont l’acronyme signifie «peuple»), ont rejoint l’équipe gouvernementale dirigée par l’ex-banquier Loukas Papademos. Outre Makis Voridis, on trouve ainsi

Adonis Georgiadis, devenu secrétaire d’Etat à la Marine marchande. Il s’était fait remarquer en 2006 pour avoir coédité un ouvrage, les Juifs, toute la vérité, dans lequel était exprimé le regret qu’Hitler n’ait pas pu tuer tous les Juifs d’Europe. L’auteur du livre, Constantin Plevris, qui avait soutenu la junte des colonels, est considéré en Grèce comme le véritable inspirateur du Laos, même s’il ne joue pas de rôle premier plan, préférant pousser son jeune fils, Thanos, une étoile montante du parti.


Raciste, antisémite, homophobe et nationaliste, le Laos n’a rien à envier aux partis d’extrême droite qui prospèrent dans l’Europe en crise. «Sauf qu’en Grèce, ce parti n’est pas considéré comme extrémiste. Ses dirigeants n’ont jamais été ostracisés dans les médias comme a pu l’être un temps Le Pen en France», souligne encore Georges Mitralias. Depuis sa création en 2000, le Laos a toujours tenté de se forger une image respectable. «Pourtant, ses membres pratiquent un double langage grossier. Sur les grands médias, ils s’affirment démocrates et tolérants, et sur la chaîne privée du fondateur du parti, ils attaquent les immigrés clandestins, les Juifs, les francs-maçons, tous considérés comme les ennemis de la nation», accuse Dimitri Psarras, journaliste et auteur d’une biographie au vitriol sur le fondateur du Laos, Georgios Karatzaferis.


Agé de 64 ans, cet ancien publicitaire et producteur de télé a quitté la Nouvelle Démocratie (conservateurs) pour créer son parti quand il a senti que les esprits étaient désormais prêts à accepter la résurgence de l’extrême droite en Grèce.

«Pendant vingt ans, le souvenir de la junte des colonels rendait impossible cette résurgence. Mais, au cours des années 90, l’afflux soudain d’immigrés clandestins a alimenté le succès des thèses xénophobes et la question du nom de la République de Macédoine a renforcé les nationalistes les plus virulents. Le Laos a été créé l’année où le gouvernement socialiste a décidé de retirer la mention de la religion sur les cartes d’identité, suscitant la colère de l’Eglise orthodoxe»,

rappelle Dimitri Psarras. Le Laos a toujours revendiqué sa proximité avec l’Eglise et défend avec ferveur l’identité orthodoxe. «De fait, c’est un discours qui plaît à certains prélats comme le métropolite du Pirée, qui prêche la thèse du complot judéo-maçonnique pour expliquer les malheurs du pays», souligne Psarras. Mais les idées de l’extrême droite reçoivent aussi le soutien implicite d’une partie de la société.


Condamné en première instance pour son livre, Constantin Plevrisa été finalement acquitté en appel par la Cour suprême. «Ce qui est inquiétant, c’est la justification apportée : ce n’était pas de l’antisémitisme car il n’attaquait que les Juifs sionistes !» s’insurge Psarras, qui y voit la preuve d’une certaine perméabilité de l’antisémitisme du Laos au sein même des institutions.

«Le danger est toujours le même avec l’extrême droite. Elle flatte les pires instincts, oblige tout le monde a se positionner en fonction de ses propres thèmes et en période de crise, elle apporte des solutions faciles à des gens déroutés», constate le journaliste.

D’élection en élection, le Laos a ainsi augmenté peu à peu son nombre de représentant au Parlement, profitant surtout de la proportionnelle. Avec 3,8% des voix, il y envoie dix députés en 2007. Ils sont quinze depuis les élections de 2009, où le Laos recueille pourtant à peine plus de 5% des voix.

«Il a du succès dans les classes moyennes, mais le vrai soutien du Laos c’est le patronat grec, note Psarras. A la différence du FN par exemple, le Laos est hyperlibéral et antiouvrier. Il est le seul parti d’opposition à avoir soutenu les mesures d’austérité prônées par Bruxelles dès 2010. La gestion actuelle de la crise lui convient tout à fait.»

Bien plus, dès 2009, le leader du Laos avait proposé le nom de l’ex-banquier Papademos pour diriger le pays et le sortir de la crise. Les voici ensemble au pouvoir.

Libération

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