France : Pour la dignité ils risquent leur vie : grève de la faim à PSA

Ils sont ignorés de tous, les medias n'en parlent pas, le gouvernement les ignorent, ils n'appartiennent pas au bon syndicat et ne font pas dans la résignation. 

25 octobre : 38e jour de grève de la faim pour des salariés de PSA


A 9h du matin ce mercredi, les employés du pôle tertiaire de PSA à Poissy (Yvelines) fument leur première cigarette sur le trottoir. Certains observent d'un œil distrait les tentes plantées devant les grilles de leurs bureaux. Cela fait trente-huit jours qu'elles sont là et font presque partie du décor. A l'intérieur, quatre salariés de l'usine dorment encore. Trois autres sont réfugiés dans une tente blanche un peu plus loin. Tous les sept observent une grève de la faim depuis le 18 septembre dernier pour dénoncer la discrimination syndicale dont ils se disent victimes en tant qu'affiliés à Sud, et surtout, la «cadence infernale» à l'usine de Poissy.

Leur porte-parole, Ahmed Oubakhti, est employé technicien agent de maîtrise et secrétaire syndical Sud chez PSA. Très affaibli, l'homme est allongé sur l'un des lits de camp, installés dans la tente blanche qui se soulève à chaque coup de vent. «J'ai déjà perdu 17 kilos. D'autres plus. Pour tenir, nous avalons six cachets de vitamines, de l'eau sucré, du café», explique-t-il, montrant la petite cafetière qui ronronne au fond de l'abri de fortune. «D'après les médecins qui nous suivent, la situation commence à devenir dangereuse. L'un d'entre nous a fait un AVC. Il a été hospitalisé deux fois», explique-t-il, péniblement.


Avant d'en arriver là, Ahmed Oubakhti explique avoir utilisé, en vain, toutes les méthodes de lutte classique pour dénoncer le rythme infernal imposé aux ouvriers de l'usine. «Après l'annonce de la fermeture d'Aulnay et les blocages, PSA a voulu rattraper les retards de production de la C3 rapatriée à Poissy. L'employeur a augmenté la cadence: le salarié doit aujourd'hui produire 58 voitures à l'heure au lieu de 40! Les ouvriers travaillent plus que leur capacité. En cas de plainte, il y a du chantage à l'emploi. Il y a beaucoup d'arrêt maladie, de dépression», affirme le syndicaliste.

Les représentants de Sud, qui tirent la sonnette d'alarme, se disent victimes de harcèlement. «Contrairement aux autres syndicats, nous avons été mis au placard. Nous n'avons pas de bureau. D'ailleurs, nous sommes toujours surveillés. Il y a des caméras sur le trottoir et tous ceux qui sont venus nous rendre visite depuis le début de notre grève ont été convoqués. Certains ont reçu des lettres de sanction», assure-t-il.

Faux, répond PSA. La direction, qui «regrette ce mouvement violent et injustifié», dénonce «des accusations graves et diffamatoires». «Il n'y a aucun harcèlement à l'égard de Sud. Ce syndicat a moins de moyen que d'autres parce qu'il ne représente que 3,7 % des salariés de Poissy et 1,9 % à l'échelle nationale», explique un porte-parole. Ce dernier nie également la montée en puissance du rythme de production, «compte tenu des difficultés que connaît le secteur automobile». «Il y a peut-être un malaise industriel en raison de la situation que traverse le groupe mais pas de malaise social», tranche la direction.

Pour sortir de l'impasse, le constructeur organise des négociations au cas par cas avec les grévistes. «Nous recueillons leurs souhaits. S'ils veulent quitter l'entreprise, ils le peuvent via le plan de départs volontaires. Sinon, ils peuvent reprendre leur mission avec un accompagnement individuel», précise le porte-parole. «Nous ne reprendrons nos postes que dans des conditions dignes et si le harcèlement à l'égard des syndiqués Sud et de ceux qui viennent leur parler cesse. PSA doit aussi réparer le préjudice vécu par chacun d'entre nous», rétorque Ahmed Oubakhti.

Les grévistes en appellent aujourd'hui au gouvernement. «Il est prêt à injecter des milliards chez PSA. Il doit être sensible au sort des salariés. Or aucun membre du gouvernement n'est venu nous voir. C'est scandaleux», lâche le syndicaliste. «Nous sommes complètement isolés. Ce n'est que lorsque l'un d'entre nous a menacé de s'immoler par le feu que la mairie a réagi en nous installant l'électricité», affirme-t-il. «Malgré cette vie triste, sans hygiène, sans confort, nous poursuivrons notre mouvement, même si nos vies sont en danger. Pour la défense des salariés», promet Ahmed Oubakhti, avant de s'allonger sur son lit de camp, épuisé par l'entretien.

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