Le CPI ne s'est jamais exercée contre un dirigeant d'un pays développé.

Ramtane Lamamra, ministre des Affaires étrangères algérien et ancien commissaire au Conseil paix et sécurité de l'Union africaine.

Jeune Afrique : ce sommet extraordinaire organisé les 11 et 12 octobre a pour but de reconsidérer la position de l'Afrique vis-à-vis de la Cour pénale internationale (CPI). Que lui reprochez-vous ?

Le sentiment qui se dégage de cette rencontre est que l'Afrique, de loin, préfère une CPI qui s'amende, une CPI qui répond favorablement aux critiques constructives et légitimes, notamment de ses États membres, qui fournit un contingent important (34 pays membres sont africains, NDLR) ; plutôt qu'une CPI qui continuerait d'ignorer toutes les demandes des états membres, et qui continuerait d'ignorer aussi le sentiment général dans les opinions publiques africaines. La CPI est d'une certaine manière un tribunal du Nord contre le Sud. Il faut amender ce qui doit être amendé, soit dans le statut de Rome, soit dans le règlement intérieur, soit dans les méthodes de travail, afin que demain, nous puissions opérer une réconciliation entre la CPI et l'Afrique. L'Afrique est toujours pour la réconciliation. Ça fait partie de notre culture.

Cette rencontre pourrait aboutir à un retrait de certains États de la CPI. Est-ce la porte ouverte à l'impunité ?

Fondamentalement, le message est que l'Afrique a longtemps souffert de l'injustice. Nous sommes certainement le dernier continent à vouloir affaiblir la Cour pénale internationale et certainement le dernier à vouloir promouvoir l'impunité. L'Afrique est tout à fait en faveur de la lutte contre l'impunité ; c'est d'ailleurs inscrit dans l'acte constitutif de l'Union africaine. Et l'Union africaine est la seule institution internationale à avoir une telle disposition.

Hailemariam Desalegn, Premier ministre éthiopien et président de l’Union africaine a reproché à la CPI d'entamer une "chasse raciale". Est-ce un état de fait, selon vous ?

À côté de la CPI, il y a cette pratique de la compétence universelle. C'est-à-dire des tribunaux européens, appliquant les dispositions de leur droit interne, s'autorisant à procéder à des enquêtes criminelles, voire même des procès contre des personnalités africaines. Et ce sur la base de plaintes d'opposants qui accusent telle personnalité, non pas d'avoir commis un acte répréhensible, mais d'avoir assumé, à une période donnée de l'histoire de son pays, une responsabilité gouvernementale. C'est pousser le bouchon un peu trop loin ! C'est ignorer la souveraineté de nos pays. Cette juridiction ne s'est jamais exercée contre un dirigeant d'un pays développé...


Jeune Afrique

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