Valls, Le Drian et Fabius à Riyad, chez les "coupeurs de têtes."
Les 12 et 13 octobre, Manuel Valls, Jean-Yves Le Drian et Laurent Fabius
se rendent en Arabie Saoudite pour quelques dollars de plus. Tant pis
si un condamné à mort de 20 ans attend d’avoir la tête tranchée.


Un peu irrités par le flirt franco-saoudien, les perfides diplomates
du Département d’Etat ont alors rappelé à Salman la mauvaise manière que
la France lui a réservé cet été. Réservé en ne mettant pas hors de
nuire les citoyens aux bérets râleurs, ceux qui ont protesté contre la
privatisation d’une plage de Vallauris qui a la malchance d’être comme
la serviette de bain du palais de Salman sur la Côte d’Azur. Parfois,
comme le lift au tennis, les petites causes ont de grands effets.
Service minimum
Mais aussi, les hommes d’Obama n’ont pas manqué de signaler que, dans
l’affaire Ali Mohamed al-Nimr, Paris avait publié un communiqué dans
lequel il rappelait « réprouver, partout dans le monde, la mise en œuvre
de la peine de mort ». Ce qui constitue un service minimum,
lorsqu'un gosse de 20 ans, condamné à avoir la tête tranchée, puis son
cadavre crucifié, pour avoir osé protester contre la condamnation de son
oncle à la peine capitale. Tout cela étant en fait le bon remède local,
celui du palais, pour faire taire « l’opposition » chiite. Il fallait
donc que Manuel, Laurent, Jean-Yves et les autres se précipitent avec
leurs salamalecs les plus astiqués aux pieds de Salman, roi et
dictateur. Dans un article du Monde l’auteur cite « un homme d’affaires
saoudien » qui, dit notre confrère, promet « des milliards de nouveaux
contrats ». Secret de polichinelle, chacun sait que la source favorite
du quotidien du soir n’est autre que le fils d’Adnan Khassoghi, célèbre
marchands de canons, et que son avis n’est que sable qui coule entre les
doigts.
Avant de rêver de vendre à Riyad des centrales nucléaires, des TGV ou
des usines d’autos, il fallait donc, d’abord, finaliser les promesses
faites lors des épisodes précédents. C’est ce qu’a fait Manuel en
passant samedi au Caire où, lors d’une cérémonie digne d’un épisode de
Tintin, on a vu l’ancien maire d’Evry verser une larme sur les épaules
d’un gros militaire couvert de galons, signant essoufflé de multiples
pages avec un grand stylo. Après le marché « Rafale », traité par
Hollande, restait les navires « Mistral » pour Valls. Et ce n’était pas
que du vent. Pour qui observe que les virements bancaires ne se feront
pas dans l’ombre des pyramides, puisque c’est l’Arabie qui paye toutes
ces factures, l’étape était un épisode à ajouter à la « Soupe au
Canard » des Marx Brothers. Le roi Salman offre donc des Rafale et des
Mistral à son fils Sissi, comme une manière de cadeau de Noël… tant
mieux si ça soulage Saint Nazaire et Le Figaro.
Pourtant le maréchal égyptien, depuis quelques mois, fait la grimace.
Il a observé le rapprochement opéré entre Riyad et la confrérie des
Frères Musulmans, vilains barbus qui, en Egypte et partout dans le
monde, sont la bête noire de Sissi. Pas grave, Salman a expliqué au
maréchal que, dans la cadre de sa guerre contre les chiites, il lui
fallait bien faire un geste envers ces Frères si sunnites.
Financements djihadistes
Heureusement que, dans ses valises diplomatiques, Manuel et sa dream
team, n’ont pas convié Bernard Squarcini, l’ancien patron de la DGSI.
D’abord « le Squale » est bien trop costaud pour être roulé dans une
valise, puis il dit trop de choses mal élevées. Ainsi, à l’occasion du
pèlerinage de nos dirigeants vers La Mecque, des malins ressortent un
extrait du livre publié il y a plus d’an an par Squarcini, « Le
renseignement français, les nouveaux enjeux »… Derrière ce titre à faire
fuir le lecteur, se cache au moins une perle. Selon le chef espion, les
groupes djihadistes qui sont venus prêter allégeance à Al
Qaïda «étaient financés principalement par le prince saoudien Bandar Ben
Sultan (secrétaire général du Conseil de sécurité nationale et chef des
Renseignements généraux d’Arabie saoudite) qui adoptait une politique
régionale indépendante de ses frères et ses cousins». C’est, précise
« le Squale », «Bandar Ben Sultan qui était derrière le financement des
groupes djihadistes en Afghanistan, en Syrie, au Liban, en Egypte, au
nord de l’Afrique», par ailleurs, «le Qatar, grand partenaire commercial
et politique de la France, était intéressé par le financement, voire
l’armement des groupes islamistes combattant en Afrique contre l’armée
française». Heureusement que Squarcini est resté en Corse, pour y
chasser le sanglier.
Les fruits d’une autre réunion, pourtant passionnante, ne seront pas
évoqués à Riyad par nos élites. Le titre de ce colloque, réuni à Las
Vegas fin septembre dans l’immeuble de l’Anti-Monney Laudering and
Financial Crime, avait pour objectif de mieux pister le financement du
terrorisme. Il y avait là la crème des super flics et celle des
banquiers, super eux-aussi. Lors de ce bal des faux culs il a été
interdit de prononcer les mots Qatar et Arabie Saoudite, on n’a parlé
que des « Etats » et de « milliardaires » qui envoient des sous à
al-Qaïda et Daech. La situation devenait si grotesque que quelques
experts, plus culotés que les autres, ont demandé à ce que l’on se
penche sur certains flux financiers issus de citoyens saoudiens,
qataris… Quelle idée infamante ! Heureusement que Le Drian et Fabius ne
pensent pas des choses comme ça. Eux ils ont le bon Manuel.
Publié par
Grand reporter et écrivain: Il
commence sa carrière chez Gallimard à la NRF puis enchaine l’ORTF,
L’Aurore, Le Canard Enchainé, L’Express, VSD, le Sunday Times,
Paris-Match et Bakchich.
En 1986 a obtenu le Prix Scoop pour avoir révélé l’affaire Greenpeace.
Commentaires
Enregistrer un commentaire