Afghanistan : Les USA vont discuter avec les Talibans ... au Qatar
L'Échec Américain
Le fait que les
Taliban ouvrent un bureau au Qatar pour discuter avec les Américains
du retrait des troupes US d'Afghanistan relève clairement de la
realpolitik. Les Américains n'ont pas le choix : ils doivent
négocier avec eux. Les Taliban se battent contre leurs soldats
depuis plus de 10 ans, ils sont des intégristes, ont recueilli Ben
Laden, fait exploser des bombes… mais il faut trouver une porte de
sortie honorable. Alors s'il faut discuter avec le diable, les
Américains le feront.
Pourquoi le Qatar ?
Le choix de Doha, capitale du Qatar, est celui de la sûreté. C'est un endroit relativement neutre pour négocier. Les États-Unis utilisent ce pays pour leur politique étrangère, ne négligeant pas le fait que l'émir dépense l'argent du pays en soft powers divers. Quant aux Taliban, ils s'y sentent suffisamment en sécurité et sont confortés par la présence d'Al Jazeera qui leur offre une tribune internationale.
Le Pakistan aurait
été un mauvais choix : trop impliqué dans le conflit afghan, pas
assez de confiance de la part des Américains.
Sans négociation, un
risque important de guerre civile
Il est naïf de
croire qu'avec ce bureau politique à Doha, les Taliban entreront
dans le jeu démocratique et s'assagiront. Là n'est pas le but. Ils
savent que les Américains ont besoin de négocier leur retrait
militaire d'Afghanistan et en tant qu'acteurs-clés du pays,
l'impasse sur eux est impossible.
L’Afghanistan est
une mosaïque ethnique peuplée notamment par des Pachtounes - dont
sont issus les Talibans - des Tadjiks, des Ouzbeks et des musulmans
chiites, qui représentent environ 10% de la population. Ces groupes
sont concurrents pour prendre le pouvoir. Or quand les troupes
américaines s'en iront, en 2014, cela risque de provoquer un appel
d'air, d'autant plus que l'actuel président Hamid Karzaï n'est pas
très solide. Il n'a ni armée ni administration assez fortes pour
lui permettre de tenir le pouvoir et n'est pas aimé de la
population.
Par ailleurs,
plusieurs pays étrangers ont des intérêts en Afghanistan : le
Pakistan, l'Iran, la Russie, sans compter la Chine qui arrive. Les
Pachtounes ont l'appui du Pakistan, les Tadjiks et Ouzbeks sont
plutôt du côté américain et les Chiites sont sous protection de
l'Iran.
Si les États-Unis
s'effacent sans rien faire ni rien préparer, le risque de guerre
civile est grand. Voilà pourquoi la négociation à Doha sera
capitale.
L'échec total de l'intervention américaine en Afghanistan
A terme, les
États-Unis souhaitent que l'Afghanistan adopte un système fédéral
basé sur des frontières ethnico-confessionnelles. C'est ce qu'ils
ont fait en Irak, avec une entité pour les Kurdes, une pour les
Arabes sunnites et une pour les Chiites. Le but, c'est d'éviter que
les Pachtounes deviennent hégémoniques. Et tout comme pour l'Irak,
les Américains voudraient que le retrait militaire se fasse en
douceur, sans trop de dégâts.
Le problème, c'est
que si le retrait d'Irak s'est fait "sans trop de dégâts",
il y a aujourd'hui et depuis quelques mois une recrudescence des
attentats. Par ailleurs, le modèle fédéral est un échec.
La stratégie
américaine peut donc être discutée… En tout cas, ces
négociations à venir avec les Taliban montrent clairement l'échec
total de leur intervention en Afghanistan.
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