Et pendant ce temps là :Hollande entend faire du Qatar un allié "normal"
François
Hollande tentera ce week-end au Qatar de dissiper la méfiance que
suscite en France ce richissime émirat dont la boulimie
d'investissements et l'activisme diplomatique dérangent, malgré son
statut d'allié privilégié. "Le
Qatar est un pays ami de la France, c'est peut-être un ami de
Nicolas Sarkozy mais c'est surtout un ami de la France"
Le
déplacement du président français intervient à un moment clé
dans la vie politique du Qatar, où une transition du pouvoir entre
l'émir, Cheikh Hamad bin Khalifa al Thani, et son fils, le prince
héritier Cheikh Tamim, est attendue.
Au
beau fixe sous Nicolas Sarkozy, qui a entraîné le Qatar dans
l'intervention en Libye, les relations avec la France ont plutôt
bien résisté à la victoire du candidat socialiste, pourtant
réservé vis-à-vis de l'émirat avant son élection.
S'il
souhaite se démarquer de la "diplomatie de contrat" et de
la personnalisation affichées selon lui par son prédécesseur,
François Hollande entend toutefois marquer la continuité.
"La
continuité républicaine vue de Doha fonctionne parfaitement",
juge un homme d'affaires français qui se rend régulièrement dans
l'émirat.
L'entourage
de François Hollande abonde dans ce sens.
"Le
Qatar est un pays ami de la France, c'est peut-être un ami de
Nicolas Sarkozy mais c'est surtout un ami de la France",
juge un conseiller de François Hollande.
Hasard
du calendrier ou non, Nicolas Sarkozy, encore influent dans l'émirat,
y a précédé son successeur de deux semaines pour une visite
privée.
Malgré
les milliards d'euros investis dans l'Hexagone, le Qatar reste mal
aimé et les sommes colossales injectées dans le club de football de
la capitale, le Paris Saint-Germain, ont parfois été critiquées en
France, où l'émirat bénéficie d'une avantageuse convention
fiscale.
"UN
PEU DE SÉRÉNITE"
Point
d'orgue des crispations françaises, l'intention du Qatar, il y a
plus d'un an, de créer un fonds d'investissement à destination des
banlieues, un projet qui avait été dénoncé comme une volonté de
les islamiser.
"Il
y a eu un certain nombre de polémiques à la fois sur la présence
du Qatar en France et sur sa politique étrangère, le but de la
visite du président de la République c'est de ramener un peu de
sérénité dans tout cela", dit un de ses conseillers.
François
Hollande devrait confirmer que l'aide à destination des banlieues
prendra la forme d'un fonds cofinancé à 50% par la Caisse des
dépôts et qu'il sera destiné aux PME, plutôt qu'à une zone
géographique ou un public déterminé.
La
volonté de la France reste d'encourager le Qatar, actionnaire de
multinationales françaises comme Total ou Veolia, à poursuivre ses
investissements sur le territoire national, mais si possible au-delà
des acquisitions de prestige comme les palaces ou de grands immeubles
parisiens.
"Ils
veulent de l'immobilier, ils adorent l'immobilier, ils aiment encore
l'immobilier et ils veulent encore plus d'immobilier", déclare
un homme d'affaires qui estime que l'Etat aimerait voir l'émirat
investir davantage dans des PME, comme ce fut le cas avec le
maroquinier Le Tanneur.
L'importante
délégation de patrons français qui accompagne François Hollande
tentera aussi de profiter des grands appels d'offres dans le cadre de
la Coupe du monde de football qu'organisera en 2022 ce richissime
exportateur de gaz naturel.
La
mère des batailles pour la France reste néanmoins le contrat pour
renouveler la flotte de l'armée de l'air du Qatar, à laquelle
l'avionneur Dassault aimerait vendre son Rafale.
"ACTIVISME
DIPLOMATIQUE"
L'Elysée
souhaite aussi tordre le cou à l'idée que François Hollande donne
une importance disproportionnée à cet Etat de deux millions
d'habitants, dont à peine 10% de nationaux.
Cette
visite s'inscrit dans le cadre d'une politique régionale plus vaste,
dit ainsi son entourage, qui rappelle ses visites récentes en Arabie
Saoudite et aux Emirats arabes unis.
Mais
l'activisme diplomatique du Qatar, qui a autorisé les taliban
d'Afghanistan à ouvrir une représentation à Doha, en fait un pays
de plus en plus présent dans le jeu régional.
Les
ministres des Affaires étrangères du groupe des "Amis de la
Syrie" se réuniront ainsi samedi à Doha pour discuter des
moyens d'apporter un soutien concret à l'opposition syrienne.
Sur
ce dossier, la France ne critique pas officiellement l'aide
qu'accorderait le Qatar à des groupes islamistes radicaux, mais
plaide pour une meilleure coordination du soutien international à
l'Armée syrienne libre.
L'Elysée
dément aussi toute friction avec le Qatar sur le Mali, où de l'aide
humanitaire en provenance de l'émirat se serait retrouvée entre les
mains des combattants islamistes.
Les
conseillers de François Hollande admettent néanmoins que le soutien
du Qatar aux islamistes dans les révoltes arabes apparaît parfois
trop exclusif aux yeux de la France.
"Les
Frères musulmans peut-être, mais pas seulement les Frères
musulmans", expliquent-ils en prônant une approche plus
inclusive de toutes les forces politiques démocratiques qui ont
émergé des printemps arabes.
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