Les effets de la pleine lune sur notre sommeil
Des
chercheurs suisses apportent les premières preuves tangibles des
effets du cycle lunaire sur le sommeil. La pleine lune aurait ainsi
de réels effets sur notre corps, dont une diminution de 30% du
sommeil profond.
Yeux
cernés, bâillements et mauvaise humeur. Pour de nombreux Français,
tous les mois c'est le même refrain, des nuits agitées et un
sommeil médiocre à cause de la pleine lune. Pour ces personnes, il
ne fait aucun doute que le cycle lunaire a un impact sur leur
sommeil. Mais faute d'étude scientifique sur le sujet, pleine lune
et mauvaises nuits restaient pour beaucoup de l'ordre de la croyance
populaire. Un point de vue qu'il va peut-être falloir réviser si
l'on en croit les résultats publiés par des chercheurs suisses
jeudi dans la revue Current Biology. Ils démontrent en effet pour
la première fois que la pleine lune perturbe le sommeil des êtres
humains.
Les
scientifiques de l'université de Bâle l'expliquent dans leur
publication, ils ont eu l'idée de cette recherche «en prenant un
verre ensemble après le travail dans un bar du coin… un soir de
pleine lune!» Spécialisés en chronobiologie (l'étude des rythmes
qui gouvernent nos fonctions biologiques), ils font alors le constat
qu'il n'existe que très peu de travaux scientifiques consacrés aux
effets de la lune sur le sommeil. «Et celles qui sont disponibles se
fondent sur des questionnaires, précise Sylvia Frey, l'un des
auteurs. Or une bonne méthodologie requiert d'utiliser des
paramètres objectifs, mesurables, chez des volontaires sains et
naïfs.»
UNE
HORLOGE «CIRCALUNAIRE»
Par
«naïf» la scientifique sous-entend que les sujets ne soient pas
mis au courant du but précis de l'étude. «Expliquer aux
volontaires que nous voulons évaluer les effets de la lune, pourrait
biaiser très fortement l'expérience ; les croyances personnelles de
chacun pouvant influencer les résultats.»
Pour
contourner cet obstacle, les scientifiques ont donc décidé de se
pencher sur des données acquises quelques années auparavant, pour
une autre recherche sur le sommeil. Ils ont repassé au peigne fin
les enregistrements polygraphiques réalisés durant les phases de
sommeil de 33 volontaires. En tenant compte cette fois-ci de la phase
dans laquelle se trouvait la lune lors du protocole initial.
Et
les résultats sont saisissants. «Nous-mêmes ne nous attendions pas
à observer des effets d'une telle ampleur», avoue Sylvia Frey. Les
enregistrements montrent en effet que dans les quatre jours qui
précèdent ou suivent la pleine lune la durée totale de la période
de sommeil est écourtée de 20 minutes. Les volontaires mettent
également cinq minutes de plus en moyenne pour parvenir à
s'endormir. Des résultats qui corroborent l'évaluation subjective
de la qualité du sommeil faite par eux-mêmes.
L'analyse
détaillée des ondes cérébrales nocturnes montre par ailleurs que
la phase de sommeil profond est également réduite pendant la
période de la pleine lune, de 30 % en moyenne. Or cette phase,
caractérisée par des ondes cérébrales lentes, est primordiale
pour l'organisme. C'est le moment où se produisent de nombreux
processus biologiques tels que la mémorisation, la sécrétion
d'hormones (dont l'hormone de croissance), ou la régénération
cellulaire.
Des
dosages sanguins réalisés en parallèle des enregistrements
nocturnes ont aussi révélé que le cycle lunaire influence la
production d'une hormone fondamentale pour la régulation du sommeil:
la mélatonine. «C'est la première fois qu'il est possible
d'apporter des preuves objectives de l'impact du cycle lunaire sur le
sommeil humain», souligne Sylvia Frey.
Pour
expliquer ces résultats, les chronobiologistes suggèrent
l'existence chez l'humain d'une horloge interne «circa-lunaire»,
comparable à l'horloge circadienne, qui rythme les activités
biologiques diurnes et nocturnes de notre corps.
Moduler
les fonctions biologiques selon le cycle lunaire aurait pu avoir son
importance dans des temps reculés. «Dormir de manière plus légère
quand la lumière de la pleine lune fait de vous une proie plus
facile pour les prédateurs nocturnes pourrait avoir eu du sens»,
suggère la scientifique. En attendant de prouver l'existence d'une
telle horloge, mise en évidence chez certains animaux marins, les
chercheurs espèrent que leurs travaux ouvriront la voie à d'autres
protocoles qui permettraient de confirmer leurs observations.
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