Grèce : Enfin, campagne d'arrestations au sein du parti néonazi grec

La nouvelle a fait l'effet d'un coup de massue en Grèce. Ce matin, Nikolaos Michaloliakos, le fondateur et chef historique du parti Aube dorée, a été arrêté avec trois autres députés du parti par la police antiterroriste grecque.


Une opération plus vaste visant à arrêter 38 autres membres ou députés de ce parti néonazi est toujours en cours, sur le fondement de mandats d'arrêt délivrés par la Cour suprême du pays et qui accusent l'ensemble des personnes recherchées ou déjà arrêtées de "participation à une organisation criminelle", mais aussi de "blanchiment d'argent". "Des accusations sérieuses qui peuvent entraîner des peines allant jusqu'à l'emprisonnement à vie", explique l'avocat constitutionnaliste Georges Katrougalos.

OMERTA
En réaction, plusieurs centaines de sympathisants néonazis se sont rassemblés devant les locaux de la police judiciaire d'Athènes, où sont détenus Nikolaos Michaloliakos et l'ensemble des autres membres du parti arrêtés. Ce véritable coup de filet a lieu dix jours après le meurtre du rappeur antifasciste Pavlos Fyssas, tué par un militant néonazi affilié à Aube dorée. L'assassinat de ce jeune homme grec a entraîné de vives réactions sociales qui ont contraint les autorités grecques à s'attaquer pour la première fois à la violence d'Aube dorée, pourtant dénoncée depuis des années par les organisations non gouvernementales.

Il est vrai que jusqu'ici cette violence visait principalement les immigrés et qu'une sorte d'omerta couvrait d'un silence total – politique comme médiatique – les actions du parti entré au Parlement avec 18 députés lors des élections législatives de juin 2012. C'est donc avec une sorte de stupéfaction que l'on assiste depuis une semaine au grand déballage des crimes et délits supposément commis aux quatre coins du pays par des membres d'Aube dorée.

SOUPÇONS SUR L'ARMÉE ET LA POLICE

L'ensemble des quotidiens grecs ou des chaîne de télé enchaînent les révélations, notamment sur la question des liens des néonazis avec l'armée et la police. Le quotidien de gauche To Vima a ainsi lâché une bombe dans son édition du dimanche 22 septembre, en publiant le témoignage anonyme d'un repenti d'Aube dorée décrivant les cessions nocturnes d'entraînement de membres du parti par des militaires – membres actifs ou non – des commandos de l'armée de terre ou de la marine. Des accusations graves qui ont obligé Dimitris Avramopoulos, ministre de la défense, a diligenter une enquête interne dont les résultats ont été publiés hier soir. Selon le rapport de Michail Kostarakos, chef des armées, "aucun membre actif de l'armée n'a participé à l'entraînement de membres d'Aube dorée".

Dans la police aussi l'onde de choc se fait sentir. Selon le quotidien Kathimerini, un agent des forces motorisées DIAS, une section spéciale de la police, a été arrêté ce matin pour connexion avec Aube dorée ; deux autres officiers sont recherchés dans le cadre d'une enquête sur la mort suspecte de cinq immigrés, et deux inspecteurs généraux de la police ont été limogés lundi 23 septembre afin d'assurer "l'objectivité" des enquêtes sur les liens entre la police et Aube dorée.

Hier, vendredi, l'agent responsable au sein des services secrets grecs (EYP) de la surveillance d'Aube dorée a été démis de ses fonctions, officiellement pour"désaccord avec la surveillance en cours". Il est en fait accusé, selon la presse grecque, de sympathies envers le parti qu'il était censé surveiller.

CATHARSIS COLLECTIVE

Dans une espèce de catharsis collective, la Grèce n'en finit plus de se plongerdans les crimes d'Aube dorée, mais beaucoup redoutent que les procédures pénales n'aboutissent pas. Le maire d'Athènes lui-même est monté au créneau ce matin. "Nous devons absolument terminer ce que nous avons commencé. C'est une organisation criminelle qui a toujours été une organisation criminelle. Nous avons tardé, en tant qu'Etat, à réagir, mais maintenant que nous avons commencé, nous devons nous montrer déterminés", a déclaré Georges Kaminis.

Le ministre de l'intérieur et de la protection du citoyen, Nikos Dendias, et le ministre de la justice ont informé ce matin le premier ministre des initiatives légales entreprises pour renforcer les peines liées à la participation à une organisation criminelle et ont aussi introduit l'examen au Parlement de mesures visant à suspendre le financement public du parti Aube dorée.

Le constitutionnaliste George Katrougkalos affirme, lui, que "l'on pouvait s’attaquer à la violence d'Aube dorée depuis des années. L'article 62 de la Constitution prévoit que l'on peut obtenir l'autorisation du Parlement pour arrêter des députés si un flagrant délit est observé. Dans le même temps, l'article 187 du code pénal stipule que participer à une organisation criminelle constitue un flagrant délit permanent".

Les députés d'Aube Dorée arrêtés ce matin se sont certes vu retirer leur immunité parlementaire, mais ils restent députés. Et continuent avec leurs collègues encore au Parlement de menacer d'une démission collective, ce qui entraînerait des élections partielles dans 18 circonscriptions et entraînerait donc une déstabilisation politique du pays.


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