Syrie : les fous de guerre

Sourd au monde

Jean-Marc Ayrault a entendu 
les incertitudes du Congrès américain et a pris la précaution 
de soumettre les frappes françaises 
à l’existence d’une coalition. Pour 
le reste, il est resté sourd à ce qui s’est dit ces derniers jours.

Rien sur les objurgations du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, à respecter la légalité internationale et à ne pas risquer la généralisation 
de l’embrasement. Pas un mot sur l’ouverture 
de Vladimir Poutine qui assure aujourd’hui que 
la Russie réagira vigoureusement si des preuves crédibles de l’utilisation des gaz toxiques par le régime syrien sont rendues publiques aux Nations unies et qui suspend 
la livraison de missiles à Damas.

Le premier ministre, enfermé dans la perspective de punir Al Assad, n’a pas saisi l’occasion de relancer des démarches diplomatiques pour une solution politique au drame qui ensanglante le Proche-Orient. Rien sur la portée de la violation des règles de sécurité collective par un pays membre du Conseil de sécurité, pas plus sur la dégradation de l’image internationale de la France, désormais auxiliaire suspendue aux décisions américaines. Le président russe a beau jeu de faire la leçon en rappelant que « tout ce qui est hors du Conseil de sécurité est une agression, excepté l’autodéfense. Ce que le Congrès et le Sénat américains font maintenant revient par essence à légitimer une agression. C’est par principe inadmissible ».

Rien non plus sur l’affichage public du refus de dialoguer sérieusement avec des pays qui pèsent aussi lourd dans les rapports de forces mondiaux que la Russie, la Chine et l’Iran. La réunion du G20, dans quelques heures, n’est pas même saisie pour relancer des négociations. Rien sur les suites d’une éventuelle intervention et sur la tentation qui pourrait être celle 
du dictateur syrien d’élargir et d’amplifier le conflit dans toute la région. Rien encore sur les mensonges destinés à justifier des frappes, comme ces propos de John Kerry prétendant, contre toutes les évidences, qu’al-Qaida
est absente du conflit.

Nous aurons donc entendu à l’Assemblée nationale l’horreur invoquée dans un plaidoyer pour plus d’horreur encore. Un député EELV – confessant cependant que son groupe n’est pas unanime – a même justifié l’escalade militaire par l’inaction politique antérieure. Quel sophisme ! 
Et quel paradoxe à invoquer la démocratie quand,
en France, la guerre et la paix ne sont pas du ressort 
du Parlement, réduit au rôle de commentateur, 
mais reposent entre les mains d’un homme, le président de la République, qui engage le pays contre l’opinion 
de l’immense majorité des citoyens.


« S’il nous reste des heures, nous redoublerons d’efforts pour prévenir la catastrophe. » Ce message de Jaurès au bord de la guerre dans laquelle allait se précipiter le monde, les parlementaires 
du Front de gauche l’ont fait leur. Le temps presse.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Le discours intégral d'Angela Davis à la marche des femmes (français et anglais )

PLAIDOIRIE DE GISÈLE HALIMI AU PROCÈS DE BOBIGNY (extraits)

Le Génocide des indiens du Brésil