Aubry à Valls: «tu dois cesser ces propos publics ou quitter le PS»

C'était en 2009
Dans une lettre adressée au député-maire d'Evry (Essonne), la première secrétaire du PS lui a demandé de quitter le parti s'il n'est plus en accord avec ses idées. 



Réponse du berger à la première secrétaire. Le député-maire d’Evry (Essonne) Manuel Valls, assure qu’il entendait «bien rester fidèle à [son] poste, à [sa[ famille politique et à [ses] valeurs», au lendemain du rappel à l’ordre que celle-ci lui a adressé via un courrier publié sur LeParisien.fr. Egalement dans une lettre dont l’AFP a obtenu copie, Valls affirme: «Quel que soit le prix à payer, je ne me ferai pas le silencieux complice de l’aveuglement», écrit-il. «A la lecture de ta lettre, je ne te cache pas ma profonde inquiétude sur ta conception très datée du parti», accuse-t-il également.

La première secrétaire du PS avait sommé Valls de rentrer dans le rang et d’arrêter de«tenir des propos [qui] portent atteinte à tous les militants et à tous les dirigeants». Tout en lui donnant du «Mon cher Manuel», Aubry lui a même lancé une forme d’ultimatum, le priant de faire un choix «dans les jours qui viennent»: se radoucir ou démissionner du PS.
«Tu donnes l’impression d’attendre, voire d’espérer la fin du Parti socialiste. [...] S’il s’agit pour toi de tirer la sonnette d’alarme par rapport à un parti auquel tu tiens, alors tu dois cesser ces propos publics, et apporter, en notre sein, tes idées et ton engagement. Mais si les propos que tu exprimes reflètent profondément ta pensée, alors tu dois en tirer pleinement les conséquences, et quitter le PS, a averti Aubry. [...] On n’appartient pas à un parti pour s’en servir, mais pour le servir.»

«LUI AUSSI A PARFOIS FRANCHI LA LIGNE JAUNE»

Premier à se porter candidat à des primaires en vue de la présidentielle de 2012, Manuel Valls, qui s’est souvent démarqué de la ligne de Solférino, notamment sur les questions de société, se montre de moins en moins tendre à l’égard de son parti, appelant jusqu’à un changement de nom: dans Libération, il estimait même qu’il fallait «désormais privilégier la clarté du projet au fétichisme des mots».
«Il n’y a pas un jour, mon cher Manuel, où tu n’expliques aux médias que notre parti est en crise profonde, qu’il va disparaître et qu’il ne mérite pas de se redresser. Paradoxalement, tu t’appuies sur nos règles collectives pour appeler à "l’insurrection militante"», lui reproche ainsi Martine Aubry.
Une première secrétaire «dans son rôle», selon Benoît Hamon. Mercredi, le porte-parole du PS a défendu son initiative: «dans cette lettre, elle rappelle les règles élémentaires de vie en commun, elle énonce des arguments. Manuel Valls est l’une des figures qui représente l’avenir du PS. Cela lui confère des droits», dont celui de faire entendre sa voix, «mais aussi des devoirs, lui aussi a parfois franchi la ligne jaune», a ajouté Hamon. Interrogé sur d’éventuelles sanctions à l’encontre de Valls ou sur des mises en garde visant d’autres franc-tireurs socialistes, il a relativisé:«On n’en est pas là, je crois que ça ne va pas au-delà.»

«LE PARTI, C’EST PAS UNE AUBERGE ESPAGNOLE»

L’ex-Premier ministre Laurent Fabius s’est, de son côté, félicité de cette mise au point: «C’est pas mal qu’on rappelle les uns et les autres au besoin d’unité. Il faut quand même qu’il y ait un pilote dans l’avion, a-t-il jugé sur RMC Info/BFM TV. Au Parti socialiste il y a toujours eu une grande liberté. Mais il y a des limites à ne pas franchir.»
Quant à Harlem Désir, il a affirmé que «Martine Aubry a dit tout haut ce que pensent de nombreux militants». L’eurodéputé, chargé de la coordination au PS, en appelant lui aussi, dans une déclaration à l’AFP, au «besoin d’un rappel aux règles collectives dans un parti où certains donnent l’impression de vouloir jouer en permanence contre leur propre camp». «Jamais de formules assez louangeuses pour Nicolas Sarkozy pour sa politique de sécurité ou d’immigration. Jamais de formule assez dures contre son propre parti», a directement taclé Désir.
«Enfin!», s’est, quant à lui, exclamé Claude Bartolone, sur France Inter. «Il était important que Martine Aubry, après avoir remis le parti au travail, après avoir rassemblé à nouveau les socialistes, y compris les amis de Ségolène Royal, dans la direction, dise: "le parti, c’est pas une auberge espagnole"», a expliqué le député de Seine-Saint-Denis, tout en classant Valls parmi les «responsables politiques de la nouvelle génération qui a du talent».
Le patron de la fédération PS des Bouches-du-Rhône, Jean-Noël Guérini a, en revanche, regretté cette mise en demeure: «J’aurais préféré qu’ils se rencontrent en tête-à-tête plutôt que ça se fasse par écrit», a-t-il déclaré à l’AFP, souhaitant «que la raison l’emporte, qu’ils se rencontrent très rapidement et qu’on trouve les solutions adaptées».

Commentaires

  1. "On n’appartient pas à un parti pour s’en servir, mais pour le servir.»
    Valls n'est pas le seul à l'avoir oublié. On en voit le résultat aujourd'hui.

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